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Newsletter Décoder l'oral anglais

QUESTION

Bonjour Fabien,

Tout d'abord, je voudrais te remercier pour tes mails car comme je n'aurais ton livre que pour mon anniversaire, ils me permettent de profiter de tes (bon) conseils en attendant.
Je suis en seconde et je vise l'ENAC (NDLR: École nationale de l'aviation civile) avec un gros test d'anglais (oral et écrit). J'ai du temps devant moi mais vu mon niveau je préfère m'y mettre tout de suite.

J'ai un problème que je voudrais te soumettre car il est assez ennuyeux : dans un dialogue oral en anglais je n'arrive pas à "séparer" les mots les uns des autres donc pas à les identifier. En gros je ne comprends que les petits mots évidents et ce n'est pas grand chose. Aurais-tu une solution (miracle ou pas ^^) ?

De plus, j'aimerais savoir si tu as des conseils pour retenir plus facilement le vocabulaire car c'est aussi une de mes lacune que j'essaye de combler mais je n'ai apparemment pas les bonnes méthodes.

Merci d'avance pour tes réponses.
Bonne journée !
Clothilde (Pont de Beauvoisin)


MES COMMENTAIRES :

Hello Clothilde,

Tu sais ce que tu veux faire déjà et c'est très bien car cela motive. Je reçois beaucoup de courriers de personnes qui désirent travailler dans l'aviation et on sent toujours une grosse motivation chez elles. Alors, un moyen simple de mettre toutes tes chances de ton côté (et de rendre ton admission naturelle) c'est de respirer, vivre, l'aviation en anglais, tout le temps. Joue à Flight Simulator en anglais et aux dizaines d'autres jeux type simulation de vol existants. Lis des tonnes sur le sujet, que ce soit sur Wikipédia ou sur Kindle. Regarde des films, sérieux (docus) ou moins sérieux ( en.wikipedia.org/wiki/Airplane! ). A ta place, j'essaierais même de me procurer des manuels de vols ou autres ouvrages pro utilisés par la profession. (Peu importe le niveau lorsque cela nous passionne).

Pour répondre à ta question, distinguer la limite entre les mots à l'oral n'est pas toujours évident pour la bonne raison que, bien souvent, cette limite disparaît! Les mots sont, à la base, des unités logiques et bien définies, avec un début et une fin. A l'oral, en revanche, ils deviennent plutôt des sons qui s'imbriquent les uns dans les autres. Il s'agit donc d'accepter cela et de voir que les espaces que l'on retrouve à l'écrit disparaissent souvent dans le langage parlé. (Cela se retrouve aussi souvent dans l'argot écrit et les contractions : "going to" devient "gonna", "want to" devient "wanna", etc.)

Un autre élément à garder en tête est que, bien souvent, dans la vitesse du langage parlé naturel, certains mots disparaissent totalement ou quasi-totalement. Impossible donc de les retrouver! Par exemple "How are you doing?" s'entend plutôt comme "How you doing?". "They're going to be here" peut très bien s'entendre "They going to be here". Et autres modifications de ce type.

Prendre conscience de tout cela t'aidera déjà à percevoir l'anglais parlé comme il est, plutôt que comme on pense qu'il devrait être (et ce que l'on pense a été fortement influencé par le texte et notre système éducatif qui se concentre sur le texte, plutôt que la parole, en langues -- ce qui développe de mauvaises habitudes d'écoute). Cela se joue aussi au sein des mots. Quelques exemples qui illustrent cela : "Wednes·day" /ˈwɛnzdeɪ/ (2 syllabes l'oral), "va·ri·e·ty" /vəˈraɪɪti/ (4 syllabes à l'oral) ou "pro·nun·ci·a·tion" /prəˌnʌnsiˈeɪʃən/ (5 syllables à l'oral).


Lorsque l'on débute l'oral dans une langue, c'est souvent comme une image floue. Imagine une image totalement floutée où l'on ne reconnaît rien. Peut-être qu'il y a des visages dessus? Ou bien des arbres? Ou bien un paysage célèbre? Eh bien, si l'image est totalement floue, tout cela reste méconnaissable. Si on rend l'image un peu plus nette, en revanche, on commencera peut-être à deviner des contours, à reconnaître des formes, des objets, des personnes. Puis, enfin, si on rend l'image VRAIMENT nette, on distinguera clairement les traits du visage d'un individu, ou bien le détail d'une mosaïque ou encore la texture d'un arbre. Tous les myopes savent clairement de quoi je parle.

Eh bien, c'est pareil en langues. Sauf que, au lieu d'acheter des écouteurs spéciaux, on va s'accoutumer aux sons TYPIQUEMENT anglais (qui n'existent pas en français), pour entendre de plus en plus clairement la langue.

On l'a vu, les limites entre les mots sont quelques choses d'imprécis à l'oral. Elles disparaissent. En revanche, ce qui va nous aider à gagner en précision c'est de développer notre capacité à reconnaître les différents sons anglais. C'est difficile à expliquer et le mieux est de passer par le processus soi-même. Mais, en somme, notre cerveau n'est plus habitué aux sons étrangers au français, il a perdu sa capacité à les reconnaître (d'où ce flou à l'oral). Avec un cours de phonétique, en revanche, on peut se réhabituer à ces sons. On commencera à les distinguer puis, de fil en aiguille, notre cerveau parviendra à bien les différencier de sons français proches, certes, mais différents. Partant de là, on sera capable de distinguer les SYLLABES des mots et, ainsi, de distinguer les divers mots d'une phrase. Lorsqu'un mot ne sera pas clair, on sera capable de l'isoler (parce que l'on aura compris les mots qui l'entourent) et, ainsi, de le rechercher.

On en revient donc à l'importance de la phonétique pour maîtriser l'oral anglais. (C'est évidemment le sujet que je couvre dans Réussir à l'oral en anglais).


Pour ce qui est de mémoriser le vocabulaire, j'en parle de manière très complète dans Le don des langues mais, en somme, s'il n'y avait qu'un seul conseil à retenir c'est celui-ci : il est essentiel de mémoriser le vocabulaire DANS SON CONTEXTE. Mémoriser des listes de mots seuls ne sert à rien, c'est une perte de temps. Un mot ne prend son sens que au sein d'une phrase qui a elle-même du sens. Pour mémoriser un nouveau mot, prends donc soin de mémoriser son usage et son contexte. (Bien l'entendre est aussi essentiel, puisque l'on ne fixe en mémoire que ce qui est clair pour nous).

La manière idéale de mémoriser un mot serait de se rappeler une histoire de quand nous avons appris le mot. Cette "histoire" pourrait être le passage d'une série télé où le mot était présent, ou bien une conversation avec un natif qui nous a expliqué le mot, ou bien quelque chose de très visuel ou qui sollicite un de nos sens... Plus l'information a de sens pour nous, plus elle sera mémorable. Le contexte permet, justement, de donner du sens à ce que nous apprenons.


Voilà, c'est tout pour l'instant. En te souhaitant une très bonne préparation à l'ENAC!

Sincèrement,
Fabien


QUESTION

Salut Fabien,

Si je t’écris aujourd'hui, c'est pour te faire part de mon principal problème en anglais, l'ORAL !

Et j'ai donc une question à te poser. Je t'ai souvent vu dire qu'il fallait regarder les séries ou films en VO uniquement. Mon problème est que je ne comprend pratiquement rien. Est-ce que de regarder des séries ou films en VOST en anglais peut m’être bénéfique, de façon assez significative, afin de comprendre l'anglais à l'oral ?

Merci de prendre le temps de me repondre, et merci du boulot que tu entreprends, si utile a mon goût !

A très vite j'espère,
Adrien

MES COMMENTAIRES :

Hello Adrien,

La meilleure manière de progresser avec les séries télé est vraiment de les regarder sans sous-titres. Cela nous oblige à VRAIMENT utiliser nos oreilles (et, ainsi, faire progresser notre compréhension orale, c'est-à-dire : notre capacité à DISCERNER les sons anglais), plutôt que d'être dépendant du texte constamment, comme un accro, et comme nous l'avons sans doute tous fait en anglais lors de notre scolarité. Au passage : la majorité des gens sont visuels avant d'être auditifs, ce qui est ou a été mon cas aussi. Il ne s'agit pas de choisir un mode plutôt qu'un autre par goût personnel mais plutôt de développer ce qui a besoin de l'être et d'utiliser le mode adapté à notre activité : pour les langues, qui sont du son avant tout, ce sera l'auditif.

Tout ceci étant dit, il est vrai que les séries télé vont souvent trop vite au début. Il est important de faire la part des choses, alors, entre :

- De grosses lacunes en phonétique. On devrait étudier le système de sons utilisé par l'anglais dès notre premier cours. En France, on attend la Fac pour cela... (!) Rappelez-vous : une langue c'est du son et du sens, rien de plus! (Le texte est une invention tardive de l'histoire de l'humanité, c'est un bonus).

- Des contenus peu adaptés. Travailler son oreille est au début assez fatiguant. On explore un nouveau territoire. Je recommande les sitcoms pour une bonne raison : elles sont faciles à suivre même sans le son et, surtout, elles sont courtes. 20-30 min est un bon temps de concentration pour travailler son oreille au début. (Au-delà, on risque de décrocher et cela devient contre-productif).

- Une impatience de notre part. Mon estimation est qu'il faut environ 2-3 semaines pour que nos oreilles s'ouvrent (plus ou moins, selon nos connaissances en phonétique). Avec les sitcoms, on peut regarder des épisodes pendant 2-3 semaines sans souci, même en comprenant très peu. Une fois passée la petite gêne de ne pas tout comprendre, c'est loin d'être laborieux.

- Un manque de vocabulaire. Cela concernera généralement les débutants et faux-débutants. Dans ce cas, la bonne stratégie consiste à apprendre l'anglais et à absorber du vocabulaire EN DEHORS des sitcoms. Les sitcoms seront alors simplement un complément utile qui nous permet d'appliquer ce que nous avons appris. (Le hasard nous fera toujours ré-entendre, dans la sitcom, des expressions vues ailleurs).

Pour conclure, les séries télé apportent le plus grand gain aux niveaux intermédiaire ou avancé ayant appris beaucoup de vocabulaire mais ayant toujours appris celui-ci par le texte (globalement, cela correspond aux élèves bons en anglais à l'école sans avoir voyagé). Les séries télé leur permettront alors, au prix de quelques semaines de "travail" de convertir un vocabulaire "texte" en vocabulaire oral. Ils corrigeront, en somme la manière dont ils pensaient que le texte se prononce. Pour ces personnes, se concentrer sur les séries télé en anglais - et ne faire quasiment rien d'autre en anglais - peut être une excellente idée.

Pour les autres élèves (débutants, faux-débutants), les séries télé ont donc leur utilité avant tout comme complément, pour illustrer la théorie par la pratique et, en somme, commencer à appliquer leur anglais sans attendre d'être à l'étranger. C'est quelque chose d'important et d'utile à faire mais, si c'est trop laborieux, on voudra faire le tour des points que je viens d'évoquer. Et, pour ce qui est d'assimiler du vocabulaire, on préférera alors plutôt la chanson en anglais aux séries télé.

A noter que, depuis la sortie de Devenir bilingue en anglais, où "j'autorisais" les sous-titres, j'ai adopté une attitude plus conservatrice. Pourquoi? En raison de mes échanges avec des lecteurs. Regarder une série en anglais avec des sous-titres est mieux pour notre anglais que de ne rien regarder du tout ou de le faire avec un doublage français... c'est sûr. Mais c'est d'un impact NEGLIGEABLE par rapport au fait de regarder une série sans sous-titres aucun. C'est quelque chose sur quoi je n'avais pas insisté dans Devenir bilingue en anglais mais c'est quelque chose à garder en tête. Les deux activités (avec sous-titres ou SANS) jouent dans des catégories à part, c'est comme de comparer le baby-foot au foot le mini-golf au golf!

En te souhaitant de beaux progrès!
Fabien